[fr] Le pari de Matteo Renzi avec la démocratie: Le référendum Italien

renzi_selfieLe 4 Décembre prochain, le peuple italien sera appelé aux urnes pour le référendum sur la reforme constitutionnelle proposée par le gouvernement conservateur et pro-austérité de Matteo Renzi. Le sujet domine la vie politique italienne en raison de l’impact que pourrait avoir cette reforme sur la vie politique et institutionnelle italienne si elle est approuvée, mais aussi en raison de l’agitation qu’elle pourrait provoquer dans la politique italienne si elle venait a être rejetée.

L’importance accordée au référendum a rapidement polarisé la vie socio-politique italienne, servant de paravent a chaque force socio-politique majeur afin de détourner l’attention publique sur ses tares. Le gouvernement et le Parti Démocrate font face a une opposition populaire grandissante en raison de l’énorme écart entre l’effet loué des politiques appliquées par les gouvernants et les difficultés d’une large frange de la population, difficultés engendrées par les politiques néolibérales dictée par l’Union Européenne. Le Mouvement 5 étoiles, malgré ses récentes victoires aux élections municipales a Rome et a Turin, est toujours aux prises avec son identité et sa structure et la médiocrité de ses élus locaux est bien visible. Forza Italia, le parti de Berlusconi, la Ligue du Nord et les autres partis de droite voient en ce référendum le moyen de déloger Renzi du pouvoir afin de se l’approprier et de continuer sur la même ligne politique néolibérale. Les différentes forces de Gauche voient en ce référendum l’occasion de revenir sur la scène politique nationale comme alternatives fiables et stables. La fédération des employeurs Confindustria est d’ores et déjà favorable au débat national car il représente une belle occasion de détourner l’attention publique sur les salaires décroissants, les droits du travail, la sécurité au travail, la précarité du travail et l’enrichissement des employeurs.

La reforme, écrite par le premier ministre Matteo Renzi et par la ministre chargée des reformes constitutionnelles Maria Elena Boschi fut présentée au parlement au début du mois d’Avril 2014. Ce fut une surprise car il n y avait aucune trace de reforme constitutionnelle dans le manifeste du Parti Démocrate PD lors des élections d’Avril 2013, ni dans le manifeste de Matteo Renzi pour l’élection a la tête du parti. Néanmoins, le gouvernement a présenté le projet de loi en montrant peu d’intérêt pour un débat parlementaire réel. En fait, les discussions et les votes furent menés par le gouvernement qui se hâta de bloquer les propositions de modifications dudit projet émanant de l’opposition ce qui obligea le projet a passer en faisant appel a de nombreux votes de confiance (selon la législation italienne, si un vote de confiance est perdu, il entraîne automatiquement la destitution du gouvernement. Le vote de confiance est couramment utilisé par les gouvernements comme moyen de pression sur le parlement afin d’adopter des projets de loi). En raison d’une règle interne, la constitution italienne exige un référendum populaire sur une reforme constitutionnelle, si approuvée de moins de deux-tiers de chaque chambre du parlement.

La reforme réécrit environ un tiers de la constitution italienne, en changeant le rôle et la composition du sénat: ses membres ne seront plus elus par le peuple mais seront désignes par les parlements régionaux et choisis parmi les membres de ces parlements et des maires des plus importantes. Le sénat garderait un pouvoir législatif mais pas comme avant. La reforme renforcerait la Chambre des députés (Chambre basse) en lui donnant plus de pouvoir législatif et en lui octroyant le pouvoir absolu de pour installer ou destituer un gouvernement. Pouvoir qu’elle partageait auparavant avec le sénat.

Les effets de la reforme vont de paire avec la loi électorale Italicum, l’une des principales reformes du gouvernement Renzi, adoptée avant la reforme constitutionnelle proposée, toujours dans le même but. Cette loi électorale est fortement critiquée car elle enlève aux citoyens une partie de leur pouvoir d’élire des représentants; pouvoir transféré aux partis et a leurs leaders. La loi donne également une surreprésentation a la Chambre des députes au parti vainqueur des élections en sous-représentant les partis issus de l’opposition.
Le résultat serait l’obtention d’une classe dirigeante non élue par le peuple, fortement biaisée en termes de représentation réelle et perçue comme étant loin et sans lien avec les circonscriptions électorales.

L’effet combiné (l’ignoble “combinato disposto”) serait du jamais vu dans un pays démocratique: un gouvernement issu d’un parti unique avec le pouvoir exécutif et le contrôle absolu sur le pouvoir législatif, un gouvernmenet élu par une majorité parlementaire composée de députés principalement nommés par le chef du parti. Un tel gouvernement serait en mesure d’élire tout seul contre le reste du parlement le Président de la République ainsi qu’une grande partie du Consiglio Superiore della Magistratura (Conseil Superieur de la Magistrature) l’autorité judiciaire. Ceci est le but réel de la reforme: Supprimer les systèmes de contrôles et de balances pour changer radicalement les institutions italiennes selon la vision néolibérale et en faveur de la classe dirigeante européenne comme demandé a mainte reprise par la BCE (Banque Centrale Européenne) en 2011 et par la Banque JP Morgan en 2013.

Ce ne sont pas les seuls points importants de l’interaction entre la loi électorale Italicum et la reforme constitutionnelle proposée. Dans une série d’articles, le journaliste Alessandro Gilioli a souligné que le peuple italien se prononcera sur la forme future des institutions sans savoir réellement ce qui se passera ensuite. La grande incertitude qui pèse sur le référendum est lié a trois cas:

Tout d’abord, Matteo Renzi a déclaré dans le passé qu’il démissionnerait et abandonnerait la vie politique italienne en cas d’échec au référendum. Plus tard il est revenu sur sa parole et aujourd’hui rien n’est moins sur ce qu’il fera.

Deuxièmement, ni la réforme constitutionnelle ni la loi Italicum ne vont changer la composition du Sénat immédiatement, ce qui signifie que ce sera décidé seulement après les prochaines élections, par les partis présents au prochain parlement.

Troisièmement; l’avenir de la loi Italicum est incertain, la loi fut adoptée par le sommet du Parti Démocrate PD lors du succès électoral de 2014 aux élections européennes. Le gouvernement l’avait adoptée sur la base du résultat aux élections étant sur que la tendance électorale était vers le haut. Mais cela a changé, et la situation était complètement différente après les élections administratives de 2016. Le réexamen de la loi Italicum a été motivé par la montée du Movimento 5 stelle (Mouvement 5 étoiles) , la baisse du nombre total des voix du PD et des défaites a Rome et a Turin lors des dernières élections municipales. Matteo Renzi, le gouvernement ainsi que l’ancien Président de la République Giorgio Napolitano ont appelé a une révision de la loi dans le but honteux d’empêcher la victoire du Mouvement 5 étoiles, parti de Beppe Grillo. Actuellement personne ne semble savoir si la loi Italicum sera changée et comment le sera t elle.

Les partis politiques pro “Oui” sont ceux composant la grande alliance centriste qui soutient Renzi a l’exception de la Coalition Choix Civique, le mouvement de Mario Monti sont: le Parti Démocrate, divers partis chrétiens démocrates, divers partis de droite issu surtout du parti Forza Italia de Berlusconi. La fédération des employeurs Confindustria et le syndicat CISL sont également avec le gouvernement. Le gouvernement des Etats Unis, le Parti Socialiste Europeen, le Parti Populaire Européen ainsi que les institutions bancaires et financières européennes et internationales soutiennent soutiennent également le “Oui” affirmant que la victoire du “Non” serait encore plus problématique que le BREXIT.

D’autres partis parlementaires et extra-parlementaires rejettent la reforme comme le Mouvement 5 Etoiles de Beppe Grillo; Forza Italia de Berlusconi; la nouvelle Gauche Italienne; la Ligue du Nord; les Verts; le parti de droite Frères d’Italie; le Parti de la Refondation Communiste ainsi que d’autres partisans du “Non” que représentent les différents groupes de lutte dans toute l’Italie qui supportent les conséquences et qui dénoncent activement les politiques néo-libérales et pro-austérités de Renzi sur le logement, le travail, l’éducation, l’économie, l’immigration et la politique etrangere. Toujours pour le “Non”, un grand nombre d’avocats et de constitutionnalistes, un grand nombre d’organisation et de comités ainsi que le plus grand syndicat italien, la CGIL, qui a rejoint les rangs non sans une certaine réticence en raison de son lien historique avec le Parti Democrate. Bien que les intérêts soient divergents entre ces groupes, tous voient en ce référendum une occasion pour chasser Renzi du pouvoir.

Les semaines à venir seront difficiles et ennuyeuses en même temps. Le publique est déjà las de discuter et de spéculer sur les scénarios possibles des reformes et du référendum. La discussion se recentre rapidement sur Renzi lui même ainsi que sur des sujets simples à comprendre tels que la stabilité du gouvernement, le coût des politiques, la rapidité du processus législatif et les pauses parlementaires, sont présentés et appuyés par les pro “Oui” tandis que les pro “Non” les acceptent trop souvent comme sujets de débat.

Si Matteo Renzi gagne le référendum, il sera beaucoup plus fort, ayant anéanti toute l’opposition politique et ayant gagné le pari perdu de Berlusconi en 2006. Mais s’il perd, il sera probablement contraint de démissionner de ses fonctions après avoir montré son incapacité a tenir la cohésion du gouvernement et d’appliquer des politiques néolibérales et pro austérité comme celles qu’il a promulgué jusqu’a présent.

Ceci signifierait un effondrement politique total. Apres la chute du gouvernement de Mario Monti, les élections de 2013 ont abouti à un parlement divisé qui donna lieu a deux gouvernements non élus, soutenus par de larges coalitions pro-austérité et néolibéraux comme ce fut le cas pour le gouvernement de Mario Monti. Depuis la chute de Monti, l’objectif des élites européennes et italiennes, aidées par l’ancien président de la république Giorgio Napolitano, fut d’éviter de nouvelles élections probablement par crainte de voir le Mouvement 5 Etoiles gagner. Ils ont donc installé des gouvernements de larges coalitions sans le consentement du peuple et sans légitimité, mais totalement acquis au projet néolibéral impérialiste européen.

Pour gagner le référendum et pour éviter de nouvelles élections avant 2018, Renzi et ses alliés ont fait et continueront de faire tout ce qui est en leur pouvoir à savoir reporter autant que possible de la date du référendum en utilisant les rôles du Premier Ministre, ministres et autres personnalités institutionnelles pour faire connaitre la reforme autant que possible, ainsi qu’utiliser les médias de masse comme des chaines TV pour la propagande et autres moyens médiatiques afin d’enfumer le publique.

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